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Trois mois de prison pour l’exemple

Les syndicats CNT de la Sarthe étaient présents vendredi dernier au tribunal du Mans pour soutenir les gilets jaunes inculpés après l’évacuation du dépôt pétrolier. Voici le témoignage d’un camarade présent à l’audience:

« Vendredi 14 décembre, j’ai assisté aux délibérations au palais de justice du Mans concernant les trois gilets jaunes condamnés à trois mois de prison pour avoir pris part au blocage du dépôt pétrolier de la ZI Sud. Des gilets jaunes et des syndicalistes étaient venus pour soutenir les camarades mais une forte présence policière interdisait à toutes personnes portant un gilet jaune d’entrer dans le tribunal.

L’audience fut un spectacle glaçant et terrifiant. Les prévenus ont été interpellés alors qu’ils se rendaient sur les lieux, n’ont pas insulté les flics, n’ont commis aucun acte de violence de l’aveu même de la procureure.

Il n’empêche que le fait de se rendre à un « attroupement visant à troubler l’ordre publique, de nature à mettre en danger les biens et les personnes » à travers « l’érection de barricades » constitue un délit. Les accusés ont déclaré « vouloir se rendre sur place pour voir se qui se passait », or la police a utilisé leurs téléphones portables dans le cadre de la perquisition et ont pu utiliser la géolocalisation des portables pour démontrer que les accusés se sont rendus plusieurs soirs de suite au site du blocage et sont donc considérés comme ayant participé à la ‘collectivité’ coupable d »attroupement

Les autres faits matériels qui leur étaient reprochés étaient la possession de masques de chantier avec filtrage, d’un couteau suisse de 8 cm de long (!) (moins que la largeur d’une main, « pour couper des petits fils électriques » dixit les accusés), et d’une petite bombe-spray de gaz lacrymogène (arme de catégorie D ! donc non considérée comme dangereuse).

Mais pour la procureure, l’essentiel était de se reposer entièrement sur la loi scélérate de 2009 qui condamnait le fait de participer à des attroupements. Les avocates ont eu beau jeu de rappeler les mises en garde du conseil constitutionnel sur le fait que cette loi ne devait pas être utilisée pour entraver la liberté de manifester et d’expression, en vain.

Trois mois de prison. Et nous sommes nombreux à être coupables du même délit, nous sommes nombreux (des centaines, des milliers) à nous être rendus sur la barricade du dépôt pétrolier au cours des 10 derniers jours. Trois mois de prison. Cela leur fera passer l’envie de recommencer, furent en substance les dernières paroles de la procureure. Avertissement aux autres!

La scène de « justice » à laquelle j’ai assisté était étrangement illustrative d’une justice de classe, où les prévenus étaient des intérimaires sur-endettés et précarisés, visiblement choisis « pour l’exemple » et non pour la moindre violence ni même outrage à agent, face à une institution sûre de son « bon droit » qui revenait sans cesse sur la notion de « reconnaissance de l’autorité républicaine ».

Soutiens aux inculpés, pas de justice pas de paix.